Les experts alertent sur cette épidémie silencieuse qui gagne du terrain partout dans le monde. Pour autant, la myopie n’est pas une fatalité. Comment agir face à cette épidémie ?

L’Institut d’Education Médicale et de Prévention lance une campagne visant à délivrer aux Français les clés pour mieux connaître et combattre la myopie.

Une épidémie de myopie liée en grande partie à nos modes de vie

En France, selon une étude menée par le CHU de Poitiers en 2016, la myopie concernerait 37 % des adultes et 20,48 % des enfants de moins de 18 ans. Cette proportion risque fort d’augmenter dans les prochaines années, d’autant qu’une majorité de Français méconnait ce trouble de la vision.

Si la génétique est impliquée dans le développement de la myopie (le risque d’un enfant est multiplié par deux si l’un de ses parents est myope et par 3 à 8 si ses deux parents le sont), elle n’explique que 10 % des cas.

L’environnement joue un rôle bien plus déterminant : forte sollicitation de la vision de près, liée notamment à la pratique croissante des écrans (ordinateur, tablette, Smartphone), allongement de la durée des études, diminution du temps passé à l’extérieur, etc.

 

Le dépistage précoce de la myopie de l’enfant est enjeu majeur qui nous anime en tant que médecin ophtalmo-pédiatre. En effet chaque mesure de freination compte car elle diminue les risques de complications qui ne sont malheureusement pas rares chez l’adulte. Nous avons aujourd’hui des moyens à disposition qui permettent d’être efficace pour lutter contre la myopie des enfants. Ils sont à la fois simples et efficaces et seront adaptés selon les besoins de l’enfant et des parents. »

Professeur Dominique Bremond-Gignac.

Plus de temps dehors chaque jour

Et si on pouvait prévenir la myopie de nos enfants en les incitant à passer plus de temps dehors ? C’est ce que suggèrent de nombreuses études ayant mis en évidence le rôle protecteur de la lumière naturelle contre la myopie. En
favorisant la sécrétion de dopamine, la lumière du jour contribuerait à limiter l’allongement de l’œil et donc à freiner le développement ou l’aggravation de ce trouble visuel.

En 2008, une étude australienne* a ainsi montré que les enfants pratiquant peu d’activités dehors étaient en moyenne plus myopes que les enfants exposés de façon régulière et prolongée à la lumière extérieure. De même, le risque de développer une myopie deviendrait identique chez les enfants pratiquant une activité sportive dehors plus de deux heures par jour en moyenne (14 h par semaine), quels que soient leurs antécédents familiaux de myopie (zéro, un ou deux parents myopes) *.

Enfin, selon d’autres études, une exposition de deux heures par jour à la lumière naturelle diviserait par 3 le risque d’évolution myopique *.

Pour réduire le risque de myopie des enfants, il est recommandé de les inciter à passer le plus de temps possible en extérieur (idéalement deux heures par jour au moins pour un effet protecteur optimal).

Moins de temps sur les activités en vision de près (écrans notamment)

A contrario, de nombreuses études montrent que plus un enfant passe de temps en vision de près (lecture, console de jeu vidéo, activités sur smartphone ou tablette), plus il a de risques de devenir myope.

De même, toute activité prolongée à une faible distance d’un livre ou d’un écran augmenterait le risque de myopie.
Pour limiter ce risque, il est donc recommandé de :

– limiter le temps passé sur les activités en vision de près (écrans notamment) chez les jeunes enfants en particulier ;
– en cas d’activité prolongée en vision de près (exemple : dans le cadre des études), s’assurer d’avoir un éclairage suffisant et faire des pauses régulières en suivant la règle du 20/20/20 : 20 secondes de pause toutes les 20 minutes en regardant à 20 pieds (environ 6 mètres) ;
– conserver une distance d’au moins 30 cm de son livre ou de son écran.

DEPISTER la myopie le plus tôt possible

Comme le montre l’étude épidémiologique menée par le CHU de Poitiers*, l’âge joue un rôle essentiel dans le processus d’évolution de la myopie chez l’enfant. Selon cette étude, la myopie progresse de façon significative entre 7
et 12 ans. Cette aggravation de la myopie se rencontre chez 33 % des enfants de 7 à 9 ans et chez 29 % des 9 à 12 ans.
Ces résultats mettent en évidence l’importance du dépistage précoce de la myopie pour permettre une prise en charge au plus tôt et limiter sa progression.

 

*Etudes

– Etude Australienne : Rose et coll. Outdoor activity reduces the prevalence of myopia in children. Ophthalmology 2008
115: 1279–1285
– Jones LA, Sinnott LT, Mutti DO et al. Parental history of myopia, sports and outdoor activities, and
future myopia. Invest Ophthalmol Vis Sci. 2007;48(8):3524-32.
– https://www.cahiers-ophtalmologie.fr/media/49fb7a30fb216da7604557a4cf992cb8.pdf

– Etude CHU Poitiers dirigée par le Professeur Nicolas Leveziel et menée auprès d’une cohorte de 137 000 enfants
myopes âgés de 4 à 17 ans, suivis entre 2013 et 2019.