Chloé Brochard œuvre depuis 2014 en tant que conseillère en compensation technologique au  CSES Alfred Peyrelongue. Son job ? Conseiller sur des aides techniques et matériels de compensation, dès le plus jeune âge et tout au long du parcours scolaire, pour permettre l’autonomie de l’enfant empêché de voir ou de bien voir.

Chloé Brochard s’est intéressée très tôt au handicap sensoriel. Mais c’est le handicap visuel qui va particulièrement l’intéresser, à l’occasion d’un stage durant ses études effectué à l’Institut Nazareth et Louis-Braille à Montréal durant lequel elle observait un programme de surdicécité.

« Je me suis rendue compte que l’accès à la communication et à l’information pour les non et mal voyants dépendaient vraiment de problèmes techniques, d’accessibilité et non du langage », explique-t-elle. « Ce qui m’a donnée envie de creuser cette question. »

Des gammes d’outils ciblées en fonction des âges et de l’environnement scolaire

Elles sont deux à exercer cette fonction au CSES. Leur rôle consiste à évaluer les besoins en outils de compensation pour les élèves scolarisés, besoins qui sont de deux types en fonction des âges ciblés : de l’école maternelle au primaire, les préconisations portent principalement sur du poste adapté car ils n’ont pas besoin de changer de classe, ce qui passe par des éléments de type bureau inclinable et lampe pour mieux lire ; l’arrivée au collège est de son côté plutôt marquée par l’introduction d’outils davantage transportables et multifonctions, principalement du matériel et des logiciels informatiques (ordinateur avec un logiciel de grossissement ou avec une plage braille et des logiciels spécifiques pour aveugles, bloc-notes braille, tablette.…).

« Notre rôle consiste à les ouvrir au monde et à leur donner de l’autonomie pour qu’ils puissent ensuite, tous seuls, rendre un devoir que l’enseignant va pouvoir lire »

Le travail s’effectue en collaboration étroite avec les autres professionnels. « Nous nous appuyons sur l’enseignant spécialisé, qui est en première ligne et connaît bien l’enfant, mais aussi sur l’orthoptiste, l’ergothérapeute, etc. », précise la professionnelle. « On nous spécifie un besoin, nous évaluons ce qui convient le mieux pour y répondre et nous formons ensuite l’élève à l’outil. »

Une meilleure ouverture au monde grâce aux smartphones

Si celle-ci observe qu’« il n’y a pas de milliers de choix possibles en matière d’outil », qu’« Internet n’est pas très accessible pour les aveugles alors que cela offre des possibilités énormes en termes de savoirs et de démarches (administratives, pour des achats, etc.) » et que « les livres numériques ne sont pas pensés accessibles », elle salue néanmoins les avancées permises par les nouvelles technologies développées autour des smartphones. « Une belle évolution qui leur a ouvert un monde sur Internet de manière beaucoup plus aisée que depuis un ordinateur et donné accès à beaucoup plus d’applications, gratuites en outre, et faciles à utiliser », se réjouit la conseillère en compensation. Cela se traduit, par exemple, par la possibilité de prendre des photos qu’une application va « lire » (grâce à la reconnaissance de caractères), alors qu’avant il fallait utiliser des scanners « pas du tout portatifs et très chers ! ». Et cette ouverture va au-delà de l’accès à des connaissances, puisque ces outils contribuent aussi à une meilleure intégration sociale, constat étant qu’ « ils peuvent échanger avec n’importe qui puisque tout le monde a un smartphone ».

Au centre, les jeunes sont suivis dès le plus jeune âge et, à partir de la fin du primaire, accompagnés et formés avec leur nouvel outil pour réussir la transition vers le secondaire. Un travail qui peut sembler long, mais qui se justifie par exemple pour l’usage du clavier. « Comme ils ne voient pas, ils doivent l’apprendre par cœur », explique en effet Chloé. « C’est un vrai travail de dactylographie, avec des exercices réguliers et répétitifs. Cela prend du temps ! Et c’est encore plus long pour les élèves aveugles car ils doivent apprendre tous les concepts informatiques. »

Un « temps » qui ne compte pas car ce qu’aime Chloé dans son métier, c’est justement ce « rapport humain, le fait d’être en contact permanent » avec ces jeunes.

« Notre rôle consiste à les ouvrir au monde et à leur donner de l’autonomie pour qu’ils puissent ensuite, tous seuls, rendre un devoir que l’enseignant va pouvoir lire, puis, plus tard, être employables. Non seulement, ils vont gagner du temps mais c’est également beaucoup plus valorisant pour eux de pouvoir le faire tous seuls de A à Z ! C’est ça que je trouve intéressant dans mon métier : nous apportons quelque chose qui va les aider dans leur quotidien puis dans leur vie d’adulte. »

Focus parcours

Chloé Brochard a démarré son parcours d’études par une maîtrise de linguistique appliquée à la langue française, obtenue en 2004. Intéressée par le handicap, elle suivait en parallèle des cours de LSF (Langue des signes française). Une spécialisation sur les technologies appliquées au handicap l’ouvrira ensuite à toutes les autres formes de handicap. Mais c’est au Canada, à l’université de Montréal, qu’elle suivra ensuite une formation préparant à l’activité spécifique qu’elle exerce, et qui lui permettra de décrocher un diplôme d’études supérieures spécialisées en intervention en déficience visuelle (équivalent d’un master 2), qui n’existe pas encore en France. Ce qui explique qu’actuellement, ces fonctions sont souvent assurées par des ergothérapeutes, des enseignants spécialisés ou encore des personnes passées par la formation d’instructeur pour l’autonomie des personnes déficientes visuelles proposée par la Fédération des aveugles de France.

Merci à Chloé Brochard pour son témoignage
Merci à Camille Pons pour la rédaction